C’est un travail minutieux de recenser tous les noms de lieux-dits puis de les vérifier sur différents cadastres. On dispose de 3 cadastres, le premier de 1808, le deuxième de 1842 et le dernier en date de 1938 est régulièrement révisé. Au fil des siècles, les noms de lieux de tradition orale ont subi de nombreuses transformations. Ils ont été fixés officiellement au XIXème siècle avec le premier cadastre et, même à ce moment-là, de nombreuses déformations graphiques fantaisistes sont intervenues. Nous en citerons quelques exemples : La Vieille pour La Vielle, Dourdé pour Dourdet…
Pourtant ces noms sont un témoignage de notre histoire. Il est important d’essayer de les comprendre pour les garder vivants.
Voici donc un exercice toponymique qui n’engage que l’auteur. La toponymie n’est pas une science exacte et chacun peut faire des hypothèses.
Les origines des noms de lieux-dits sont diverses. Pour se repérer, nos ancêtres avaient recours à ce qui leur paraissait le plus caractéristique d’un paysage ou d’un lieu : le relief, la nature du sol, la végétation, le nom de l’habitant…
Les noms des cours d’eau, éléments immuables des paysages, sont pour la plupart les noms les plus anciens. Par exemple la Garonne est « l’eau des cailloux, le torrent », avec la racine *gar- « pierre. » Dourdé (en F6 sur le plan) c’est notre Dordogne, notre Adour, notre Durance, l’élément *dur/dour- désigne l’eau. Beulaygues (F3) à rapprocher de Belaygue « belle eau.» Mais qui nous dira ce qu’est La Jorle ? Voilà une première énigme à soumettre aux meilleurs linguistes.
Les formes du relief étaientaussi des lieux faciles à repérer pour nos ancêtres, et les noms qui y font référencesont plus nombreux que les précédents sur la commune.
Au cœur du village, Castres (E5) du latin castrum, évoque sans doute le château, la place forte primitive installée sur un site naturel défensif.
Non loin de là, Pujos (E3*)culmine à 150 mètres, à la même altitude que le bourg. Du latin podium : petite éminence. En Gascon, de nombreuses variantes : poi, poei, puch, puei : Puch d’Agenais, Puymirol
Tuc (F6) : en Gascon, le tuc désigne une colline peu élevée. La racine du mot serait kuk- « tête, mont arrondi » que l’on retrouve dans Cuq, Cocumont (47), Montcuq (46).
Tap (Tap de Dourdé E6) : désigne aussi une petite butte. Si vous remontez de La Jorle vers le village par la VC n°3, au pas de course ou à la marche, vous serez rapidement essoufflé par le tap…
Quelques noms évoquent la nature du sol.
Terrehort (D6) est la forme gasconne de terrefort, sol lourd et argileux. Lasboubées (E4-F4) est le lieu de la boulbène, sol plus léger, clair, siliceux, de nature argilo-sablonneuse.
Les terrassesqui bordent la Garonne sont graveleuseset plus à l’ouest, favorables au vin des Graves de Bordeaux. Nous n’avons pas le vin mais nous avons la Gravère (B2). On peut mentionner aussi Caillaou (G5) comme endroit caillouteux, en gascon, cailloux se dit calhau.
Peyré (E5) désigne aussi un lieu où il y a beaucoup de pierres. La Peyrigne, ancien nom de la route départementale 268, était une chaussée empierrée, dès l’époque romaine.
Beaucoup de noms de lieux-dits évoquent la végétation naturellequi occupait autrefois les sols et dont, aujourd’hui, nous ne voyons aucune trace.
Le Brulhois était sans doute caractérisé par ses broussailles. Le mot occitan, brulhès est issu duceltique broglium « taillis ». Plech (D8) désigne en gascon une haie ou un petit bosquet. Cap de Bosc (C8), c’est la « limite du bois », et Sauclayre (E9) est un bois peu touffu (sau du latin silva « forêt. »)
Aujourd’hui, les lieux appelés Lagarenne (F5), Laslanne G4( = les landes) ne nous paraissent pas particulièrement incultes…
Certains noms signalaient la présence d’arbres : le Sahuc D6 « le sureau », Labernèze (F2) de l’occitan vèrn ou vèerhe « l’aulne », Mouran (E7) « le mûrier » avec le suffixe -an pour les noms de lieux de passage. Il est possible que Guinot (C7) soit un dérivé du nom du cerisier guin.
D’autres indiquaient la présence de plantes : Branat (D7) de brana « la bruyère » ; à Jonccas (G3), on peut faire l’hypothèse que le jonc poussait. Pédegoze (D9), un très joli nom, est la déformation de « pè de gos », la fétuque des moutons, une plante très résistante. Pè de gos en gascon, se traduit par « pied de chien. »
Chacun sait que la vigne était très présente sur notre territoire grâce aux moines qui l’avaient implantée: Vignau (E10) Vignes longues (G3). Le Sigau (D8) tire probablement son nom du « seigle ». Labatut ((E6) est une transcription fautive de l’abatut. En gascon abatut est le participe passé de abater « abattre, faire tomber » L’étymologiste Fénié propose d’expliquer ce nom comme « terre défrichée.»
Les constructions des hommes : Moulins (D5) et Moulinet (G4) ne posent pas de problème étymologique. Sur le premier lieu-dit, on voit encore les murs de 2 moulins à vent, sur le deuxième, les ruines d’un moulin à eau.
Latapie (C8) évoque probablement une ancienne construction en « pisé » ou torchis, mélange de terre, de paille et de chaux, du verbe tapiar « battre la tapia, tasser ».
Quant à La Vielle ((D9), c’est une toute autre histoire. Le plan cadastral de 1938 mentionne la Vieille et ceux de 1808 et 1842 mentionnent La Vielle. Une petite recherche a permis de constater qu’effectivement cette graphie est la bonne. En latin, le mot villa désigne une ferme avec ses dépendances, le dérivé vièla en occitan a pris le sens de village.
Les métiers des hommes : Jean Boué (G5) devait être le nom d’un gardien de troupeaux : boué déformation de boèr « le bouvier. »
A Carboué (E6), lieu-dit très boisé, il est probable qu’un charbonnier fabriquait du charbon de bois. Ce toponyme se retrouve dans d’autres lieux, sous la formeCarbone.
Les noms de personnes : Des prénoms gascons: Esteven (D5) Etienne, Herran (B3) Fernand, Marsan (D8) prénom latin Marcus avec suffixe de nom de lieu –an. Des variantes du prénom Pierre : Peyré, Peyronneau, Peyremounic = Pierre-Ramon (Raymond), Mounic étant un diminutif de Ramon
Lécussan serait d’origine gallo-romaine, formé sur le prénom Liccucius + le suffixe –an.
Des surnoms : Vidau (D5) du latin vitalis « plein de vie », et Gros Felix ( H3) sans doute d’origine plus récente.
Mais le nom même de Moirax, quelle est donc son origine et quelle est sa signification ? C’est une énigme non résolue que nous laisserons à la perspicacité des spécialistes.
*Les coordonnées indiquées sont celles du plan-guide de la commune édité en 2010.
Recherches effectuées et présentées par Mariette SEMELIN